« Ah ! Les concombres, les melons, les oignons… comme nous étions bien en Égypte ! »
Livre des Nombres, ch. 11, v. 5.18
frère Sylvain Detoc
Couvent de Toulouse
Oignons d’Égypte
Épluché… comme un oignon. C’est l’image qui me viendrait presque à l’esprit quand je regarde Jésus sur la croix. On lui a tout pris. Son manteau, sa tunique, sa dignité. Et finalement sa vie. Le Crucifié fut même enseveli à la va-vite, tout juste enveloppé dans un drap. Pas davantage le temps de laver son corps, pourtant si torturé.
Le trésor funéraire de Toutankhamon, à côté, quel contraste ! Les pharaons, on les embaume soigneusement ; on entasse autour d’eux quantité d’objets précieux ; on les enferme dans un, voire plusieurs sarcophages. Que ne ferait-on pas pour lutter contre l’inexorable dépouillement de la mort ? C’est ce qu’on pourrait appeler le « syndrome des oignons d’Égypte » : ronds et pleins, symbole d’abondance jusque dans l’au-delà. Éprouvés par la faim et le dénuement, les Hébreux étaient prêts à rebrousser chemin pour en ravoir et se remplumer.
À moi aussi, quand je ne suis pas dans mon assiette, il m’arrive de regretter le temps où je satisfaisais toutes mes envies. « Ma nourriture, dit Jésus, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé. »* La volonté de Dieu ? Ce pain-là, franchement, ne nous paraît pas toujours très appétissant. Jusqu’au jour où l’on découvre que la volonté de Dieu, c’est que « tous les hommes soient sauvés et parviennent à la pleine connaissance de la vérité »**. Aujourd’hui, c’est de cette manne que je veux me rassasier.