Veillée Pascale: « la Résurrection nous délivre des pierres qui oppressent l’âme »
Dans son homélie de la Vigile pascale, samedi 30 mars, le Pape a médité sur le sens des pierres de la mort qui oppressent nos âmes, exhortant à lever les yeux vers Jésus Ressuscité pour faire renaître l’espérance des décombres de l’échec. Devant 6 000 fidèles en prière dans la basilique Saint-Pierre, François a vilipendé «les murs de caoutchouc de l’égoïsme et l’indifférence», regrettant que les aspirations à la paix «soient brisées par la cruauté de la haine et la férocité de la guerre».
La liturgie de la veillée pascale a commencé samedi soir dans une basilique Saint-Pierre plongée dans les ténèbres. À la troisième invocation du chant «Lumen Christi», la basilique s’est allumée, faisant traverser la nuit de la résurrection, symbolisant le passage de la mort à la vie.
Les traditions liturgiques de cette nuit sainte ont été déployées, avec l’Exsultet chanté en latin, trois lectures de l’Ancien Testament, les Psaumes et cantiques, et la lettre de saint Paul aux Romains, convergeant vers l’Évangile de la Résurrection, lu à travers le récit de saint Marc. Le Pape a concélébré la messe avec 34 cardinaux, 25 évêques et 200 prêtres. Au cours de la célébration, François a baptisé et confirmé huit catéchumènes, venus d’Albanie, du Japon, de Corée du Sud et d’Italie.
Cruauté de la haine et férocité de la guerre, des pierres de mort
Dans son homélie, le Souverain pontife a médité sur deux moments révélateurs de la joie de Pâques: celui des femmes, qui aux premières lueurs du jour se rendent au tombeau et se demandent avec angoisse «qui roulera la pierre» (Mc 16, 3); puis, celui où «levant les yeux, elles voient que la pierre a déjà été roulée» (Mc 16, 4).D’abord, face à la grosse pierre derrière laquelle gît le Prince de la paix «obstacle insurmontable», «point final de l’espérance» des trois femmes, le Pape a évoqué «la pierre tombale» parfois lourdement placée à l’entrée de nos cœurs. «Elle étouffe la vie, éteint la confiance, nous emprisonne dans le tombeau des peurs et de l’amertume, bloquant le chemin vers la joie et l’espérance».Pour l’évêque de Rome, «ces pierres de la mort» se manifestent dans les souffrances et dans la mort d’êtres chers; dans les échecs et les peurs qui empêchent d’accomplir le bien; dans toutes les fermetures qui freinent les élans de générosité et ne permettent pas de s’ouvrir à l’amour; «dans les murs de caoutchouc de l’égoïsme et de l’indifférence» qui refusent l’engagement à construire des villes et des sociétés plus justes et à taille humaine; dans toutes les aspirations à la paix brisées par la cruauté de la haine et la férocité de la guerre. Chacune de ces situations appelle cette angoisse: qui roulera la pierre du tombeau?
Les temps forts de la Veillée
Lever les yeux vers Jésus pour vaincre les ténèbres
Mais le Pape rappelle que ces femmes qui avaient les ténèbres dans le cœur témoignent d’une chose extraordinaire: «en levant les yeux, elles ont vu que la pierre avait déjà été roulée, alors qu’elle était très grande». «Voilà la Pâque du Christ, voici la force de Dieu: la victoire de la vie sur la mort, le triomphe de la lumière sur les ténèbres, la renaissance de l’espérance dans les décombres de l’échec», a poursuivi le successeur de Pierre, exhortant à lever les yeux vers ce Dieu de l’impossible «qui a roulé pour toujours la pierre et commencé à ouvrir nos tombeaux, pour que l’espérance n’ait pas de fin».
«Levons nos yeux vers Jésus», a souhaité le Pape, assurant qu’une brèche de lumière infinie est ouverte pour chacun grâce à Christ. «Ressuscité par le Père dans sa chair, dans notre chair, par la force de l’Esprit Saint, il a ouvert une page nouvelle pour le genre humain.»
Explosion de joie dans les cœurs
Dès lors, aux côtés de Jésus, le Saint-Père a assuré qu’aucune expérience d’échec et de douleur, aussi douloureuse soit-elle, ne peut avoir le dernier mot sur le sens et le destin de notre vie. «Désormais, si nous nous laissons saisir par le Ressuscité, aucune défaite, aucune souffrance, aucune mort ne pourra arrêter notre marche vers la plénitude de la vie», a affirmé François, appelant chacun à demander au Christ «que la puissance de sa résurrection fasse rouler les pierres qui oppressent nos âmes».
«Sœur, frère, que ton cœur explose de joie en cette nuit sainte! Chantons ensemble la résurrection de Jésus», s’est exclamé le Souverain pontife, concluant son homélie en citant le moine bénédictin français, père Jean-Yves Quellec, décédé en Belgique en 2016, et auteur de «Dieu face nord» en 1998: «Chantez, terres lointaines, fleuves et plaines, déserts et montagnes… Chantez le Seigneur de la vie qui sort du tombeau, plus brillant que mille soleils. Peuples brisés par le mal et meurtris par l’injustice, peuples sans place, peuples martyrs, chassez en cette nuit les chantres du désespoir. L’homme des douleurs n’est plus en prison: il a ouvert une brèche dans la muraille, il se hâte de venir à vous. Que le cri inattendu s’élève dans les ténèbres: il est vivant, il est ressuscité ! Et vous, frères et sœurs, petits et grands… vous qui êtes dans la misère, vous qui vous sentez indignes de chanter… une flamme nouvelle traverse votre cœur, une fraîcheur nouvelle imprègne votre voix. C’est la Pâque du Seigneur, c’est la fête des vivants».